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réalité ou illusions perdues ?
17 novembre 2011

Les activités bancaires transfrontalières menacées

2011-11-14

LONDRES – Enfin, on a pris la mesure de la gravité de la crise de la zone euro. Les enjeux ne pourraient être plus importants. Tant bien que mal, les gouvernements et les institutions financières sont arrivés à une solution – malgré des contraintes politiques et économiques extrêmement importantes. De nombreuses questions conceptuelles restent encore en suspens ; et la mise en application sera à tout le moins aussi difficile.

Les leaders de la zone euro doivent à présent chercher à préserver non seulement la monnaie unique, mais aussi les bénéfices liés à l’intégration financière en Europe. Aucune région au monde n’a autant profité d’activités bancaires transfrontalières ; pourtant, cette réussite est à présent menacée – et, avec elle, les groupes bancaires européens eux-mêmes.

La menace qui pèse sur les banques transfrontalières ne vient pas seulement de leurs bilans qui se détériorent à cause de la chute de qualité de la dette souveraine ainsi que des faibles perspectives de croissance. Elle vient aussi de la réponse politique elle-même. Le fait que les banques européennes aient besoin de montants énormes de capital frais est à présent accepté de manière générale. Cependant, malgré les tentatives courageuses de la nouvelle Autorité Bancaire Européenne pour mandater et coordonner les mesures nécessaires, une solution européenne devra forcément tenir compte du réseau des filiales étrangères à travers l’Europe.

Mobiliser un soutien pour les banques européennes sera difficile ; étendre ce soutien aux filiales le sera encore davantage. Pourtant, au contraire de l’exposition peu judicieuse à la dette souveraine partout en Europe, les activités bancaires transnationales au travers des filiales étrangères ont bénéficié aux investisseurs, dans les pays d’origine comme dans les pays d’accueil – et surtout dans les pays émergents de l’Europe centrale et de l’est, qui constituent toujours le plus grand marché à l’exportation de la zone euro.

Pour les banques au cour de la zone euro, il s’agit d’une région proposant des rendements extraordinaires, qui fait aujourd’hui partie intégrante de leurs opérations. Dans les pays émergents européens, les filiales étrangères ont aidé à la construction de systèmes financiers plus stables et ont permis aux économies de converger plus rapidement vers les niveaux de revenu européens moyens.

Lorsque la crise globale s’est déclenchée en 2008, il n’existait pas de cadre légal de protection des réseaux transnationaux et des vulnérabilités importantes, sous la forme d’endettement et de risque de change excessifs, ont été mises à nu. Il y a eu beaucoup d’évolutions depuis lors : les bilans ont été renforcés et les modèles de financements ajustés. En parallèle des réformes institutionnelles au niveau européen – en particulier la création du Conseil Européen sur le Risque Systémique et de l’Autorité Bancaire Européenne – la régulation et la supervision ont été renforcées dans les pays d’accueil des filiales.

Certains de ces éléments peuvent rendre la finance plus couteuse, mais ils diminueront aussi le risque des opérations bancaires. L’un dans l’autre, il s’agit donc de développements positifs.

Malgré tout, la menace sur la stabilité financière est potentiellement plus grave aujourd’hui qu’en 2008, parce que la capacité des gouvernements de l’Europe de l’ouest à protéger les systèmes bancaires est clairement en train d’atteindre ses limites. Laisser les filiales de banques étrangères devenir orphelines au cour d’une crise qui s’aggrave dans les pays d’origine diminuerait la confiance dans les systèmes financiers des pays européens émergents, ce qui pourrait générer des chutes de prix d’actifs et des contractions précipitées du crédit. En fin de compte, cela se retournerait contre les banques de l’Europe occidentale, étant donné leurs liens financiers et réels profonds avec la région.

En 2008, un tel scénario catastrophe fut évité de peu grâce aux interventions politiques, dont l’effort de coordination sous la dénommée Initiative de Vienne (dans laquelle la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement, parmi d’autres, était impliquée). Il est aujourd’hui besoin urgent d’un nouveau pacte pour assurer la réussite de l’intégration financière. Les autorités des pays d’origine et d’accueil de ces banques doivent collaborer.

Comme pour l’initiative de Vienne, un « Vienne 2.0 » demanderait des engagements de toutes les parties concernées. Lorsque les banques répondent aux exigences de capital plus élevées imposées par les autorités et choisissent de lever plus de capital ou de vendre des actifs, elles devraient prendre en considération le rôle important de leurs filiales dans de nombreux pays. Pour beaucoup de banques, cela se fait naturellement – leurs filiales, en tant que créatrices de valeur, représentent des pièces critiques de leur business model. Pour d’autres, par contre, les filiales sont plus petites par rapport à la taille de la maison mère – et donc moins centrales dans leur stratégie.

Les pays d’origine doivent aussi contribuer. Au sein de la zone euro, n’importe quels recapitalisation, garantie et autres financements offerts à des banques mères devraient être disponibles à mesure égale pour les filiales. Toute restructuration exigée contre un soutien en capital devrait prendre en considération la nature transfrontalière des groupes et ne pas discriminer contre des filiales à l’étranger.

Les pays d’origine des filiales, de leur côté, doivent rassurer les banques mères que la régulation financière restera prévisible. Certaines des mesures abruptes – et parfois trop ambitieuses – qui ont récemment été prises pour taxer le secteur ou redistribuer le poids des crédits en devises étrangères ont amoindri les réserves de capital et ralenti la reprise du crédit et de la croissance.

Tout cela requiert de la coordination. L’Autorité Bancaire Européenne a la possibilité de jouer ce rôle. Elle doit veiller à ce que les intérêts nationaux ne minent pas l’intégrité des groupes bancaires transfrontaliers. En fin de compte, nous avons besoin d’une assurance dépôt couvrant l’ensemble de l’Europe et d’une autorité européenne de résolution des défaillances bancaires qui puisse reprendre et racheter les banques en faillite.

Alors que la zone euro a stimulé le développement financier et la croissance économique pour ses membres, la crise actuelle risque d’infliger de sérieux dommages collatéraux bien au delà de ses frontières. Toute solution durable à la crise doit assurer l’intégrité des groupes bancaires et respecter les intérêts des pays d’origines et d’accueil de ces banques. En définitive, ce sont les activités bancaires transfrontalières qui sont en jeu.

Erik Berglof est Chief Economist à la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement.


 

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