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réalité ou illusions perdues ?
20 décembre 2011

Le rapport sur le financement des syndicats n’a pas été adopté ? Que cache-t-il ?

Nicolas Perruchot : « L’UMP m’a lâché ! » 

Propos recueillis par Pierre Laffon


Pour la Revue Parlementaire, Nicolas Perruchot a accepté de revenir sur l’épisode inédit du rejet de son rapport par la commission d’enquête. Le député du Loir-et-Cher est très étonné de ce vote dû à un choix politique du parti majoritaire.

 

Pourquoi votre rapport sur le financement des syndicats n’a pas été adopté ?

L’UMP m’a lâché. Je ne m’attendais pas à cela : l’UMP a participé aux travaux de la commission d’enquête, ils en ont assumé la présidence (NDLR : Richard Mallié était le président de la commission). Je n’ai vu le coup arriver que la veille du scrutin. Ils se sont finalement abstenus, ce qui est complétement incohérent au regard de leurs explications de votes où ils ont souligné la qualité du travail effectué ! Les conséquences sont dures puisque je ne peux pas publier ce travail (1). A l’UMP, seul Arnaud Richard a bravé la consigne en votant pour. Richard Mallié, le président de la commission, m’avait dit la veille qu’il voterait sans doute pour. Il a dû être appelé entre-temps par Christian Jacob (le président du groupe UMP)... Mon collègue du Nouveau Centre, Francis Vercamer a voté pour également. Ce qui se passe est hallucinant. Je n’ai jamais vu ça pour une commission d’enquête parlementaire. C’est fou !

« L’UMP a décidé de caviarder mon rapport sans l’avoir lu »

Quel est donc ce contenu si sensible de votre rapport ?

J’ai fait un rapport équilibré. 70 pages sur les syndicats d’employeurs, 70 pages sur les syndicats de salariés. Ce que je regrette, c’est que l’UMP ait décidé de caviarder mon rapport sans l’avoir lu… Il a été mis à la lecture des commissaires enquêteurs mardi matin alors qu’à ce moment-là, la décision semblait déjà être prise du côté de l’UMP… C’est cela qui est dramatique. S’ils m’avaient dit qu’ils n’étaient pas d’accord avec telle ou telle proposition, nous aurions ajourné le vote et retravaillé la question sans difficulté… L’UMP a une position de principe : ne pas parler de l’argent des syndicats à l’Assemblée nationale. C’est un sujet tabou et cet épisode va alimenter les soupçons.

Quelles étaient vos propositions ?

Nous en faisions 29 pour prolonger la loi du 20 Août 2008 qui obligeait la publication des comptes. Nos propositions concernaient la certification des comptes des comités d’entreprises. Nous souhaitions aussi faire évoluer la formation professionnelle et la médecine du travail.

Quelle a été l’attitude de l’opposition ?

Ils ont critiqué mon approche en disant que j’en avais trop fait sur les syndicats de salariés et pas assez sur ceux des employeurs, ce qui est faux car, je le répète, mon rapport est équilibré. Ils ont participé mollement aux auditions. Je n’avais donc pas compté sur leur soutien. Mais ils ont été très surpris par l’attitude de l’UMP au moment du vote.

Pouvez-vous publier ce travail par d’autres moyens ?

C’est assez difficile car je suis tenu par l’article 6 de l’ordonnance de 1958 sur le fonctionnement des assemblées qui prévoit une peine d’un an d’emprisonnement et 15000 euros d’amende (2)... Je pourrais publier un travail avec d’autres éléments que ceux de la commission d’enquête. Mais il faudra trouver un éditeur courageux, courant le risque d’être ostracisé… Ça n’est pas un hasard s’il y a eu peu de livres sur le sujet.

Le scandale de l’UIMM semble toujours dans les têtes …

Je ne sais pas si c’est cela qui gêne car, honnêtement, l’audition de l’UIMM s’était très bien déroulée. Le président Saint-Geours avait fait une très bonne audition en apportant de nombreux éléments. Il ne pouvait pas parler de la période du scandale étant entré en fonction qu’après. Il a démontré que son organisation syndicale s’était transformée de l’intérieur notamment en termes de transparence. C’est vrai que l’UIMM est une organisation puissante car disposant d’importants moyens financiers mais leur démarche va vers la transparence. Ce syndicat est également demandeur de plus de transparence. Il ressort d’ailleurs de nos auditions des différents syndicats (de salariés et d’employeurs) qu’ils ont tous compris l’intérêt de la transparence. Ils sont demandeurs.

« Il n’y a aucune volonté politique alors que les syndicats sont disposés à être plus transparents »

Qu’en est-il du MEDEF ?

L’audition s’était également bien passée avec le MEDEF. Nous n’avons rien appris de particulier sur ce syndicat. La principale difficulté est que les entreprises peuvent adhérer à plusieurs syndicats. On peut adhérer au MEDEF, à la CGPME et à l’IUMM en même temps, ce qui rend difficile l’évaluation de la représentation des entreprises dans les différentes branches. Les syndicats des employeurs en conviennent d’ailleurs.

Alors, d’où viennent les pressions ?

Il y a un problème général de financement des syndicats dans notre pays. Tous les syndicats ont collaboré sans problème à notre enquête et ont apporté leurs propositions. Je ne sais pas où et à quel niveau il a été décidé qu’il ne fallait pas en parler.

Pour la majorité, ce thème aurait pourtant pu être politiquement « rentable »…

A l’Assemblée, nous aurions pu nous saisir de ces travaux pour avoir des moyens de contrôle sur les syndicats, ce qui n’existe aucunement actuellement. L’Etat a très peu de moyen de contrôle sur les syndicats et il ne veut pas en avoir. Il n’y a aucune volonté politique alors que les syndicats sont disposés à être plus transparents. Nous avons réussi la réforme du financement des partis politiques. Il faut désormais s’attaquer à celle du financement des syndicats.

 

(1) Une commission d’enquête est tenue de publier les résultats de ses travaux 6 mois après sa création. La mission en question a été créée le 6 juin. Il est impossible désormais pour Nicolas Perruchot de remettre au vote un travail modifié avant le 6 décembre,  date limite.

(2) Cet article dispose : « Sera punie des peines prévues à l’article 226-13 du code pénal toute personne qui, dans un délai de vingt-cinq ans, sous réserve des délais plus longs prévus à l'article L. 213-2 du code du patrimoine, divulguera ou publiera une information relative aux travaux non publics d’une commission d’enquête, sauf si le rapport publié à la fin des travaux de la commission a fait état de cette information ». L’article en question du Code pénal énonce : « La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. »

1-Rapport Perruchot - la synthèse des propositions
2-Rapport Perruchot - la synthèse des propositions
3-Rapport Perruchot - la synthèse des propositions
4-Rapport Perruchot - la synthèse des propositions
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