Allez soyons curieux : dette totale américaine
Les-Crises.fr - Lundi 12 Décembre 2011
La Fed venant de fournir les chiffres de la dette pour le 3e trimestre 2011, les deux graphiques suivants font un état des lieux de l’endettement de l’ensemble des agents économiques États-Unis depuis 1929 :
La folle croissance de la dette totale américaine (publique + privée) depuis le début des années 1980 saute aux yeux. Exprimée en % du PIB, elle a largement dépassé son pic historique d’endettement de 300 % du PIB de 1933 (dû alors essentiellement aux entreprises, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui) pour atteindre 370 % en 2009. (NB. Je précise pour les puristes que j’ai évidemment inclus dans la dette publique la dette intragouvernementale officielle – nous y reviendrons dans les prochains jours).
La hausse récente a d’abord été due au secteur financier (développement du financiarisme) et aux administrations publiques (reaganisme coupant les recettes), puis à partir de 1995, aux ménages (boom immobilier). On observe également la hausse continue de l’endettement du secteur financier dans les 50 dernières années avec une forte accélération au milieu des années 1980. Près de la moitié de cette dette est émise par les Government-Sponsored Enterprises (GSE), entreprises financières comme Fannie Mae ou Freddy Mac, qui disposent de la garantie implicite publique. Au vu de l’état de ces structures, une bonne partie est en fait de la dette publique.
Analysons la situation depuis 2000 :
On observe d’abord que globalement la dette totale diminue légèrement depuis mi-2009.
En fait, la dette des ménages a brutalement stoppé en 2008 ; elle diminue légèrement depuis. La dette publique a explosé : il est flagrant que l’État a en fait repris à sa charge une partie de la dette des établissements financiers (ABS) pour sauver le système financier. Depuis deux ans, c’est bien l’État qui s’endette pour maintenir l’économie à une vitesse inconnue depuis 1940.
Mais il convient d’être vigilant : on observe ici un ratio dette/PIB, or le PIB augmente un peu. Pour bien analyser, il convient de revenir à une dette en dollars :
En fait, exprimée en dollars, la dette totale s’est simplement stabilisée – et elle repart très légèrement à la hausse depuis 1 an. C’est un réel progrès, mais on est très loin d’un début de remboursement ! La faiblesse de celui-ci, rapporté à la rapidité des hausses passée, est sidérante.
Si on regarde simplement l’évolution de la dette chaque trimestre, on obtient le graphique suivant :
On observe bien le timide désendettement de 2009 et surtout le soutien colossal du secteur public à partir de 2008…
On note d’ailleurs que le désendettement n’est principalement dû qu’au secteur financier. Or, pour bien percevoir l’impact de la dette sur l’économie réelle, il convient souvent de ne regarder que la dette du secteur non financier, qui, elle, reste parfaitement stable, les dépenses du gouvernement empêchant une chute de l’endettement, donc de l’activité :
En fait, la dette n’est tout simplement plus remboursable vu le niveau atteint. Tenter de le faire va plonger le pays en récession. Mais comme les États-Unis ne peuvent plus continuer à s’endetter, le modèle économique de “consommation à crédit” est mort.
Comment la machine américaine va-t-elle pouvoir tourner quand le gouvernement va couper (très prochainement) ses dépenses ?